mardi, janvier 04, 2011

Mânes censurés

Mânes censurés


Il y a toujours un peu de folie dans la passion mais il y a toujours un peu de logique dans la folie.

(certains passages peuvent choquer les personnes sensibles)


Tout est si noir. Un noir immatériel, un noir aux jets d'encre, au goût de terre inanimée. Assombrissement qui se rompe à la portée de ma vue, là où commence le rien. Tout est décadence au déclin de mes yeux. Rien ne frissonne plus, rien ne respire plus. Combien le fruit pourri de toutes les volontés se sont altérées comme une rose que trop souvent respirée? Sans toi plus rien ne dure, plus rien ne brille excepté, probablement, la mort qui n'est plus la promesse de paix de jadis.

Assis nu sur la pierre froide et rugueuse de ton lit immortel, je rêve. À toutes ces nébulosités qui nous ont grisés, nous ouvrant les portes de la déchéance, nous jurant délectation perverse sans doléance, sans regret moral. Étendu, la peau frigorifiée, je me rappelle les bruits d'ambiance, ceux de la facilité, des demandes implorantes. Son de cuir mordant la chair déjà rougie, éclair de lame perçant l'épiderme tendre qui s'étire fébrilement faisant d'elle une bouche béante, avait jeûné, désirant tout ingérer. Ô! Comme j'aimerais encore que nous déversions encore l'un sur l'autre tant de torrent passionnel liquéfié! Nous savourer quelques instants, le temps d'éponger notre soif corrompue, d'atténuer le feu barbare qui brûle notre pensée, nous plaisant dans la consommation de la folie. Et le sang…

Coulant de vie, essence angélique, garantie d'une largesse impeccable. Joindre dans l'obscène le corail, l'argenté, l'éclatant. Une seule encore.

Debout au coté de ton corps au teint légèrement blafard dormant dans ta prison de granit, je te contemple, comme si fréquemment je l'avais fait lorsque tu étais chaude et ton visage souriant à la vie. Mais cette nuit tu es… si belle dans ton sommeil. Sereine et calme, l'air paisible. Je souhaite que tu ouvres les paupières et que d'une main, tu me caresses le visage comme autrefois, rayonnante, comme tu l'avais toujours été. Le membre bien droit, je te vois là, dans ton lit de pierre, faisant pression sur ta nuque en élevant ta tête quelque peu amaigrie, entourée de ta sombre chevelure aux couleurs désormais ternes, dans l'intention d'un baiser. Ta bouche s'ouvrant sur un gouffre, un lac sans fond, refroidi et desséché.

"Puis-je ma bien-aimée? Puis-je te dévêtir comme jadis?"

Je t'assieds, seule ton indifférence me balance une contestation lorsque je te tire par ta longue robe.

Lentement, dans un bruit de tissu glissant dans le silence, tu te dévoiles à moi. Tes jambes sont noircies jusqu'à tes cuisses qui sont légèrement plus claires. Ton jardin des plaisirs se perd dans des teintes verdâtres et violacées. Ta tête tremble sur mon épaule lorsque je libère tes seins et chaque fois un organe en toi cède. Te déshabiller complètement? Non, je te repose, le tout remonté jusqu'au-dessus de la poitrine, comme lorsque nous nous désirions trop pour se tracasser de ce genre de frivolité.

Debout à tes pieds, la verge inondée d'exaltation, je relève tes jambes à la texture d'une banane trop mûre, les appuient sur les rebords. L'odeur abjecte caresse mon visage, s'introduit avec force dans mes orifices. Si séduisante, totalement abandonnée à mes soins, j'attends l'écho de ton "prends-moi". Ma langue perce mes lèvres se dirigeant vers ta bouche. J'écarte tes lèvres, dégageant des effluves qui empoissonnent mes sens, brûlent le peu d'humanité qui survivait encore dans un coin égaré de ma raison. Ainsi privé de cohérence, je t'embrasse avec envie, t'ouvrant toute grande à ma bouche sauvage. Le clapotis de tes restes m'écœure et m'hypnotise. Je me retiens au dernier moment de pénétrer de mes doigts cette grotte prometteuse de viscosité car tu mérites mieux et je ne veux désormais que vivre pour t'idolâtrer.

Sans tarder mais avec douceur, je m'étends sur toi. Enfin réunis, dans un contact charnel au-delà de la mort. La résistance de ton jardin contre mon arme de plaisirs est jouissive. Je me sens sinistre, écœurant, d'une perversité qui, je sais, t'aurait fait frissonner d'envie. Mon intense lubrification vient à bout de me frayer un chemin jusqu'à tes… entrailles.

Ma verge baigne dans un mélange de chair décomposée, de jus épais et nauséabond qui s'échappe un peu à chacun de mes mouvements.

Ton corps sursaute à chacun de mes coups. Je fixe ton visage, attendant que tu aspires de façons irrégulières, que tes bras s'accrochent à moi, enfouissant tes ongles ou m'exigeant une cadence plus accélérée. Mais rien…

À genoux devant ou règne un chaos de forme alourdi, j'explore doucement et énergiquement ma veine douée pour engendrer la vie. Sans languir, je me cache en toi, m'excommuniant à chaque battement de cœur. Ton visage couvert de sang semble se revivifier, je me sens défaillir, tes paupières s'entrouvrent et me fixent langoureusement.

J'explose en toi, les oreilles envahies de tes encouragements qui me supplient de venir en toi. Mes bras tremblent, ma force m'abandonne, paisiblement je me repose sur toi. Mon souffle s'éteint, j'ois l'écho de mon cœur battre dans ton corps vide. Est-ce le tien ou le nôtre?

Sous mes derniers spasmes ton bassin s'effondre sous moi, L'air est une symphonie de léger craquement et de matière spongieuse et humide cherchant à fuir. Mais plus rien n'importe maintenant.


Mes yeux se ferment sur ton profil, juste au moment où tu te tournes vers moi en souriant, étoiles brillantes dans les yeux, et une main sur mon visage, me souhaitant la bienvenue à tout jamais à tes côté dans votre mort, comme tu l'avais fait dans ta vie. Nous serons ensemble pour toujours, rien, plus rien, pourra nous séparer désormais.

La mort est douce à tes côtés, cette mort qui autrefois, me faisait tellement peur, me comble de bonheur. Encore une fois, tu ouvres tes bras pour me recevoir,jamais plus, nous ne serons séparés.



Karole McDowell 2007-2011 (c) La reproduction est interdite sans l'autorisation de l'auteure.

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